21 fevrier 2004

CEREMONIE AU MONT VALERIEN

HOMMAGE AUX FUSILLES DE L’AFFICHE ROUGE


21 février 1944

Soixante ans aujourd’hui, le 21 février 1944 les 22 des 23 patriotes condamnés à mort quelques jours auparavant sont exécutés. Seule Olga Bancic n’est pas fusillée ; déportée, elle sera décapitée à Stuttgart le 15 mai.

Qui étaient ces hommes ? Deux Arméniens, deux Hongrois, deux Roumains, huit Polonais, quatre Italiens, un Espagnol, plus un Polonais et un Italien naturalisés Français, tous immigrés économiques ou réfugiés politiques. Egalement deux Français de souche Cloarec et Rouxel, le benjamin, qui ne figurent d’ailleurs pas sur la fameuse affiche rouge puisque celle-ci était destinée à démontrer que les terroristes étaient tous des étrangers.

Rappelons-nous le texte du tract qui fut distribué en même temps qu’était placardée l’affiche sur tous les murs de France. Il disait :
« Si des Français pillent, volent, sabotent et tuent, ce sont toujours des étrangers qui les commandent, ce sont toujours des juifs qui les inspirent, c’est l’armée du crime contre la France ».

Effectivement, parmi les 22, beaucoup étaient juifs et, circonstance aggravante, tous communistes sauf Cloarec.

Mais, en ces heures, tous ces hommes, de toutes origines se comportèrent en combattants pour notre indépendance, alors que tant de Français léchaient les bottes nazies.

La publicité donnée par les Allemands au procès des 23 était révélatrice d’une méconnaissance totale des sentiments réels des
Français et de leurs réactions.

L’Affiche Rouge n’a pas eu pour effet de détourner les Français des « terroristes étrangers ». Par contre, elle a appris à tous ceux qui l’ignoraient encore qu’il existait en France des groupes organisés appartenant à une véritable armée, se considérant toujours en état de guerre contre l’Allemagne et agissant en conséquence au mépris de leur vie.

Soixante ans ont passé : l’idéologie fasciste couve encore sous la cendre. Les campagnes racistes, antisémites, islamophobes et
xénophobes nous rappellent la nécessité de la vigilance. C’est le combat des mêmes contre les mêmes. Côte à côte, Français et immigrés juifs et non juifs, démocrates de toutes opinions, il nous faut dresser le barrage.

Notre « Association pour le Souvenir des Fusilles du Mont Valérien et de l’Ile de France » s’est fixé comme objectif la pérennisation de la mémoire et la défense des valeurs pour lesquelles les 23 sont allés jusqu’au sacrifice suprême.

Pérennisation de la mémoire, auprès des jeunes d’abord, non pour faire pleurer mais pour qu’ils sachent que cela a existé et qu’ils demeurent vigilants ; pérennisation de la mémoire sur ce site : un pas a été franchi avec l’érection du monument de Pascal Convert, mais beaucoup reste à faire: d’abord, compléter les 1000 noms avec ceux qui ont été oubliés, obtenir également que la possibilité de visiter le site soit étendue à tous les jours de la semaine avec présence des gardiens, bien sûr. Sinon, qui connaîtra la clairière, qui verra le monument, qui visitera la chapelle ? et nous en arrivons à un autre questionnement : quand et dans quelles conditions le musée ouvrira-t-il ses portes ; quand les graffitis de la chapelle seront-ils reconstitués ?

Les 23 étaient nos frères et notre soeur. « Je ne regrette pas mon passé » affirmait Celestino Alfonso à son épouse et à son fils.
« Après midi, nous serons exécutés. Pas très agréable mais c’est la lutte » écrit Willy Szapiro à sa compagne Henriette.

Leur être fidèles, à eux qui criaient " vive la France" en s’abattant , c’est ce qui conduit notre action.

Nous continuerons à lutter pour que leur idéal de justice et de paix devienne réalité. Nous faisons nôtre l’épilogue du poème « Légion » que Paul Eluard leur avait dédié « Lorsqu’on ne tuera plus, ils seront bien vengés. Et ce sera justice. »

Robert Créange
Secrétaire Général de la FNDIRP
(fédération nationale des déportés, internés, resistants patriotes)

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