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DES DECHETS EN ILE-DE-FRANCE
Conseil régional d'Ile-de-France, Mercredi 7 juin 2000 Introduction de Jean-François Boyé - Conseiller régional
Madame, Monsieur, Le 21 Juin prochain, l'assemblée régionale organise un débat public sur la politique des déchets en Île-de-France, en présence de Madame Dominique VOYNET, Ministre de l'Environnement. Cette réunion se déroulera alors que les Plans départementaux d'élimination des déchets sont en cours de révision et que le débat sur l'opportunité de reconstruire une usine d'incinération à Issy et à Tremblay rebondit, après l'abandon du projet de Vitry. Dans ces conditions, les Conseillers régionaux communistes, de la Commission environnement, ont souhaité vous entendre afin que notre Groupe puisse, par la voix de son Président, Daniel BRUNEL, lors de la venue de Dominique VOYNET, se faire le porte parole d'une large réflexion fondée sur les besoins des citoyens et des élus. En guise d'introduction, permettez-moi de dresser un bref état des lieux. Pour ce faire, je m'appuierai sur le rapport de Madame Nicole BRICQ, qui porte sur "l'Évaluation de la politique régionale en matière de traitement des déchets", publié en décembre 1999. Ma première remarque porte sur l'augmentation de l'objectif de recyclage contenu dans les plans révisés d'élimination des déchets. Ainsi, dans les Hauts-de-Seine, il est porté de 5,5 % en 1998 à 24, 3 % en 2003. L'objectif est ambitieux. Il répond à un défi de civilisation visant à la réduction du gaspillage des ressources naturelles de notre planète. Il n'était plus possible, en effet, de continuer sur la voie de la mise en décharge, plus ou moins contrôlées, à cause de l'accroissement considérable des tonnages collectés : doublement en 30 ans, et de la modification sensible de la composition des déchets ménagers : augmentation exponentielle des emballages, du verre et des plastiques. L'incinération est le mode majoritaire de traitement des déchets. Cet outil a sa place dans un projet de valorisation des ordures ménagères à condition que les usines soient équipées de procédés de traitement performants des fumées et qu'elles ne soient pas surdimensionnées dans le seul but d'amortir des investissements lourds. Le compostage est encore peu répandu. Il constitue pourtant un mode intéressant de transformation des déchets verts qui pourrait être développé, en particulier, dans les communes ou les particuliers en produisent des quantités importantes. La collecte sélective des déchets rencontre de plus en plus l'assentiment des citoyens et des élus car elle présente le plus d'avantages en termes environnementaux tout en limitant le gaspillage des ressources. La généralisation de la collecte sélective augmentera, dans les années à venir, les tonnages récupérés. Mais la difficulté réside dans son coût. En effet, la mise en place du tri sélectif par les communes renchérit le coût de collecte et de traitement et les investissements que doivent réaliser les syndicats ont été sous-évalués par la loi Royale. La Région soutien, avec l'appui de l'ADEME, cet effort financier par le biais des contrats "Terres vives d'Ile-de-France". Ces derniers ont eu un indégnable effet d'accélération sur la politique d'investissement des collectivités locales et des syndicats de collecte bien qu'ils se heurtent à un certain nombre de difficultés. Elles résultent d'abord de la complexité à établir des bilans et des résultats en raison de la superposition de différents niveaux d'Intercommunalité et de contrats avec les sociétés gestionnaires. Elles tiennent encore, dans certains cas, à la perte de maîtrise du système de gestion globale de traitement des déchets par les collectivités locales au profit d'opérateurs privés. Ainsi, comme le souligne Madame BRICQ, "les conventions d'exploitation signées avec les opérateurs peuvent comporter des coûts fixes basés sur un tonnage minimum à incinérer, ce qui freine le développement des collectes sélectives." Les difficultés résultent aussi du statu quo sur l'organisation actuelle des flux de déchets qui renvoie obligatoirement à la question de la solidarité à l'échelle interdépartementale et régionale. La seule connaissance des plans départementaux ne permet pas la mise en oeuvre des cohérences régionales nécessaires. Le niveau territorial choisi par le législateur manque de pertinence et surtout n'est pas adapté au cas de l'Ile-de-France. Une vision régionale s'imposerait, avec un rôle accentué de coordination, confiée à la Direction régionale de l'Environnement (DIREN), sous la responsabilité du Préfet de Région. C'est le sens de l'intervention que nous avons effectuée lors du vote du budget primitif 2000 de la Région. Je pourrais aussi évoquer la question de l'évolution des barèmes d'intervention de l'ADEME. Un nouveau protocole a été signé avec la Région. Sa pérennisation nous semble essentiel pour permettre une viabilisation des actions menées par les collectivités locales et les syndicats de collecte. En matière d'évaluation, nous plaidons pour la mise en place d'outils permettant de suivre l'exécution des contrats "Terres vives". Ainsi, la mise en place d'un véritable Observatoire régional des déchets, aujourd'hui reporté, en raison du vote négatif de l'opposition, serait un atout pour réaliser une évaluation approfondie de la politique de la Région. Par ailleurs, je voudrais exprimer nos inquiétudes concernant l'avenir des contrats "Terres vives". Le projet, notamment évoqué dans le rapport BRICQ, d'étendre leur domaine à la réhabilitation des décharges, s'il est louable, ne risque-t-il pas de se faire au dépend du financement des activités actuellement aidées ? Dans ces conditions, la révision en cours des plans départementaux d'élimination des déchets ménagers, consécutivement à la circulaire "VOYNET", constitue un enjeu politique, écologique et économique considérables avec des conséquences financières importantes pour le citoyen, le contribuable et le consommateur. Cette révision et les efforts consentis par les collectivités locales et les syndicats permettront-ils d'atteindre l'objectif fixé par la loi Royal, qui prévoit la fin de la mise en décharge de déchets bruts, à l'échéance du 1er juillet 2002 ? De sérieux doutes existent. Ils tiennent à l'absence de plan d'élimination des déchets à Paris - toujours en cours d'élaboration -, à la révision déjà réalisée de ceux d'autres départements qui n'apportent qu'une réponse partielle au déficit de traitement, au report de la réalisation de centre de tri et à l'abandon ou au report de tous les projets d'usines d'incinération en petite couronne. D'autres questions sont évoquées. Elles tiennent à la logique de plan départemental. Ne risque-t-elle pas de nous conduire vers un système qui réserve les capacités de traitement des usines aux communes du département concerné et donc à terme à la départementalisation des Syndicats ? De même, combien de temps encore les territoires de Seine-et-Marne et du Val-d'Oise accepteront-ils l'enfouissement de déchets venant du centre de la région parisienne ? Autant de questions qui appellent un examen serein des équipements nécessaires pour développer le tri et le compostage et lorsque cela s'avère nécessaire l'incinération répondant aux meilleurs normes environnementales et l'enfouissement des déchets ultimes. Un autre défi régional à relever est celui de la faible prise en compte des Déchets Industriels Banals dans les plans départementaux. La réalité économique de la région devrait inciter à mieux prendre en compte cette question à l'avenir et à y apporter des solutions appropriées. Enfin, j'évoquerai le problème du transport des déchets. Les norias de bennes qui traversent chaque jour les villes concernées - 400 à Saint-Ouen autant à Issy-les-Moulineaux - sont une nuisance importante. Des améliorations sont possibles grâce à une redéfinission des plans de circulation, à la mise en service de véhicules non polluant et à une utilisation des voies ferrés ou des voies fluviales pour l'évacuation des produits de trie vers les centres de retraitement. Le Port Autonome de Paris devrait être plus impliqué dans cet effort commun. Voici les observations que je tenais à vous présenter pour introduire cette rencontre. |