Sur le fonctionnement des institutions européennes actuellement
"extraits d'une rencontre-débat avec Yasmine Boudjenah, le 6 avril 2004 à Paris"

1) 3 institutions majeures

La Commission

Elle a un pouvoir exorbitant. Constituée de représentants non élus, désignés par les gouvernements des Etats-membres. Or, le rôle de cette Commission est éminemment politique - il est de réfléchir à des directives (demain appelées " lois "), que les Commissaires soumettent ensuite à la fois au Conseil des ministres et au Parlement européen. Pour le moment, il y a deux commissaires par " grand " pays (France, Allemagne, Grande-Bretagne) et un pour les plus " petits " pays.

A 25 pays, cela ferait une Commission pléthorique. Jusqu'en 2009, le même système sera maintenu. Ce que Valéry Giscard d'Estaing a proposé dans le projet de Constitution, ce serait d'en avoir un par pays, avec certains commissaires sans portefeuille.

Aujourd'hui, une grande part du travail des parlementaires nationaux consiste à transposer les directives européennes dans le droit national.

La Commission est la seule institution à avoir un pouvoir d'initiative. Il peut arriver qu'un pays qui préside l'Union européenne (UE) incite la Commission à travailler sur une question. Mais le Parlement, pour l'instant, n'a aucun pouvoir d'initiative, contrairement au parlement national.

Dans certains domaines, comme la concurrence, la Commission a droit et pouvoir de les gérer comme elle l'entend. Malgré tout, lorsque les dirigeants gouvernementaux disent " c'est pas moi, c'est Bruxelles, c'est faux ". Si la Commission propose, au final, qui prend les décisions, amende : d'une part le Conseil des ministres, d'autre part le Parlement européen. Il y a de plus en plus de domaines où ces deux institutions ont un pouvoir de " co-décision ". Par exemple sur les services publics, tous les textes de libéralisation passent entre les mains des députés européens, avec un système de navette entre le Conseil des ministres concernés (transports, industrie) et le Parlement européen. En cas de désaccord, le texte est bloqué. Il y a donc un vrai pouvoir de co-décision.

Le Conseil européen

- les chefs d'Etat et de gouvernement, qui se réunissent deux fois tous les six mois
- très régulièrement, les ministres de chaque secteur (finances, transports, éducation…) prennent des décisions

Le Parlement européen

Le Conseil peut remettre en cause ce que la Commission propose. Par exemple, au Conseil de Barcelone, en 2002, J. Chirac et L. Jospin ont signé le texte final du Conseil qui faisait référence à une volonté commune d'allonger l'âge de la retraite de 5 ans et à la libéralisation du marché du gaz et de l'électricité.

Pour être effective, une directive passe d'abord par les institutions européennes.

2) La Constitution et la renégociation éventuelle du Traité de Maastricht

Les choses ne se posent pas en termes de " renégociation " du traité de Maastricht. Si en 1992, Maastricht a été un traité fondateur qui a accentué la politique capitaliste de l'UE, enclenchant un processus irréversible, depuis, d'autres traités ont repris tout Maastricht (par exemple Amsterdam en 1997, Nice en 2000).

La question posée est moins la renégociation qu'une remise à plat réelle des orientations actuelles de l'Union pour aller vers d'autres orientations. D'autant plus si on rédige une autre Constitution.

Pour ou contre une Constitution ?

Le mot est très connoté. L'esprit qui la sous-tend est fédéraliste, toute sensibilité politique confondue. Il s'agirait d'un pas irréversible vers des états unis d'Europe.
Une constitution, parce qu'on est dans une communauté solidaire, pourrait être un texte fondateur indiquant pourquoi on décide de vivre ensemble. Pour contribuer à ce que chacun progresse dans son développement, qu'on construise un avenir progressiste.

Ce n'est pas le terme qui pose problème. S'il s'agissait d'un texte fondateur, le processus pour y parvenir devrait correspondre à cette ambition. Or, pour l'instant, la Convention de Valéry Giscard d'Estaing était constituée de parlementaires européens et nationaux, de représentants de gouvernements et de représentants de la Commission européenne. Cela ne permet pas un processus constituant démocratique réunissant les citoyens des 25 pays concernés.

Si texte fondateur il doit y avoir, sur des grandes questions comme les services publics, la Constitution pourrait dire qu'ils doivent être les piliers d'une société moderne et démocratique. C'est aux citoyens de le définir.

3) L'élargissement à la Turquie.

Une position a été adoptée majoritairement par le groupe GUE/NGL. Plus globalement, le groupe a voté pour l'entrée individuelle de chaque nouveau membre, mais a voté contre le rapport général présenté au Parlement, s'opposant aux motivations et implications de cette décision.

Concernant la Turquie, c'est en décembre 2004 que sera prise la décision d'ouvrir ou non les négociations sur l'entrée de ce pays au sein de l'UE. La droite française représentée au Parlement s'est déclarée, avant Alain Juppé, opposée à cette adhésion, position nouvelle qui, jusqu'alors, n'était relayée que par Valéry Giscard d'Estaing.

Pour le groupe GUE/NGL ; la Turquie fait historiquement partie de l'Europe. En revanche, le pays ne respecte pas les critères nécessaires à l'entrée, en particulier sur la démocratie et les droits de l'homme (la répression se poursuit à l'encontre de divers partis politiques qui sont interdits, le maintien en prison de la députée Leyla Zana, la question kurde…)

 

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