Mémoire isséenne et communiste


 

 

61ème anniversaire de la Libération
Intervention de Guy DUCOLONE, déporté-résistant
président de la FNDIRP d’Issy les Moulineaux
28 août 2005


Ce matin, une fois encore, nous nous retrouvons pour célébrer la mémoire des combats de celles et de ceux qui ont participé à la Libération de Paris.
Ils étaient des jeunes et des anciens, des femmes et des hommes.
Ils étaient des Français et des étrangers. Ces derniers, en grand nombre, avaient trouvé asile en France, chassés de leur patrie par le nazisme en Allemagne, par le fascisme en Italie et dans les pays d’Europe centrale. Ils ont mené durant quatre années dans tout le pays le même combat patriotique contre les oppresseurs nazis.

« Je meurs en soldat régulier de l’armée française de libération », écrit le 21 février 1944, quelques heures avant d’être fusillé, Missak Manouchian l’Arménien, dans sa dernière lettre à Mélinée, son épouse.

Il est bien, qu’en permanence, soient rappelés et honorés ces lutteurs qui, tels les étudiants du 11 novembre 1940, manifestent à l’Arc de triomphe ou encore quatre ans plus tard, le 17 août 1944, ces 37 jeunes chrétiens et communistes massacrés à la Cascade du Bois de Boulogne.

Ces héros sont pour la plupart tombés en criant Vive la France, face à ceux qui les fusillaient.

En cette année 2005 ont été célébrés, avec beaucoup de solennité, le soixantième anniversaire de la libération des camps de concentration et de la capitulation, sans condition, des armées hitlériennes le 8 mai 1945.
La paix, dont tous souhaitaient qu’elle soit définitive, était revenue en Europe. Mais, ce n’est qu’en août 1945 que la deuxième guerre mondiale prit fin, après que près de 300 000 Japonais furent tués par les bombes atomiques sur Hiroshima et Nagasaki.

Les cérémonies de 2005 n’empêchent pas, au contraire, de garder la mémoire des jours de la libération de Paris et des communes limitrophes.
Au début d’août 1944, Paris et les villes voisines, plus de la moitié de la France sont encoure sous l’emprise du pouvoir et des troupes hitlériens.
Certaines sont casernées dans l’Ile Saint Germain à Issy les Moulineaux.
Mais, ce ne sont plus les troupes insolentes, qui en juin 1940, descendaient les Champs-Elysées. Elles étaient des perdantes.
Battues en Libye, écrasées à Stalingrad, bousculées en Normandie, elles étaient en train de perdre la bataille de Paris. Et, le Général de Gaulle pouvait dire, le 25 août 1944, à l’Hôtel de Ville de Paris :

« Nous ne dissimulerons pas cette émotion profonde et sacrée. Il y a des minutes qui dépassent chacune de nos propres vies – PARIS – Paris outragé – Paris brisé – Paris martyrisé, mais Paris libéré, libéra par lui-même, libéré par son peuple, avec le concours des armées de la France entière, de la France qui se bat, de la vraie France, de la France éternelle.
La France rentre à Paris chez elle. »

Et dans ses Mémoires de guerre publiées en 1962, de Gaulle dit, en parlant de la signature de la capitulation de Von Choltitz :

« L’issue des combats de Paris est aussi satisfaisante que possible. Nos troupes remportent une victoire complète sans que la ville ait subi les destructions ; la population, les pertes que l’on pouvait redouter. J’en félicite Leclerc. Quelle étape sur la route de la gloire. J’en félicite aussi Rol Tanguy que je vois à ses côtés. C’est en effet l’action des forces de l’Intérieur qui a, au cours des précédentes journées, chassé l’ennemi de nos rues et démoralisé ses troupes. »


Ces troupes étaient encore nombreuses à Paris. Lors des combats, plusieurs milliers d’Allemands ont été tués et 8000 ont été fait prisonniers.


Du côté français, beaucoup trouveront la mort lors de ces combats. Il en fut recensé 1593 dont 130 soldats de la 2ème DB. Près de 5000 furent blessés.
Parmi les morts, citons ceux, qui arrêtés dans l’Ile Saint-Germain, furent jetés à la Seine et retrouvés au barrage de Suresnes. Ils étaient de ceux qui répondaient à « l’ordre d’opération n 25 du Colonel Rol » qui demandait, je cite :

« Effort maximum à porter sur les boulevards extérieurs, enter la Porte d’Orléans et la Seine à Issy les Moulineaux, pour prêter la main aux éléments blindés, qu’empêche la division allemande, en place à Issy les Moulineaux et dans les localités avoisinantes, de remonter sur Paris. »

Le commandant du Grand Paris, le Général Von Choltitz avait, dans les jours précédents, reçu l’ordre d’Hitler de ne pas céder un pouce à Paris ou alors de détruire la capitale de la France. Les ponts de Paris, les principaux monuments ont été minés. Le 15 août partent encore de Pantin 546 femmes vers Ravensbrück et 1654 hommes vers Buchenwald. Le 18 août, un dernier convoi de 1240 déportés quitte la forêt de Compiègne vers Buchenwald.

Mais le moral était atteint, les moyens – y compris militaires – étaient mis en cause. Le 10 août, plus un train ne peut circuler, les cheminots sont en grève. Puis ce sont les métallurgistes. Parmi les premiers figurent les ouvriers de chez Voisin à Issy les Moulineaux. Toutes les corporations arrêtent le travail. Même la police et la gendarmerie sont au diapason.

C’est à l’appel du commandant FFI de l’Ile de France, Rol et du président du comité parisien de Libération, Tollet, à la population parisienne de se soulever ; à construire des barricades pour gêner les blindés ennemis.
En même temps, le Colonel Rol envoie des émissaires vers les troupes alliées, notamment au régiment du Général Leclerc afin qu’elles viennent à Paris participer à la libération et éviter l’écrasement de l’insurrection.


Dans leur enthousiasme et par leur courage, les Parisiens et les Parisiennes, comme celles et ceux des villes proches, avaient en tête et au cœur le souvenir des combattants de la clandestinité dont un grand nombre était tombé sous les balles hitlériennes.
En ces jours de fin août, ils pensent à tous les prisonniers des hitlériens. Ils ignorent encore que ce sont 160 000 femmes et hommes de France qui sont dans les camps de concentration et le sort qui leur est réservé. Plus de 110 000 ne reviendront pas. Parmi eux, 70 000 enfants, vieillards, femmes, hommes jetés dans les chambres à gaz et les crématoires d’Auschwitz, parce que Juifs ou Tsiganes, et que les nazis les jugeaient indignes de vivre.
Les 40 ou 50 mille autres mourront sous les coups, la faim, le froid, dans le travail forcé ou tués sur les routes des marches de la mort.


Soixante et un ans après, nous avons toujours en mémoire – et nous souhaitons qu’il en soit ainsi dans l’avenir – que le 25 août 1944, les Parisiens avec les troupes de la deuxième DB, sont dans les rues de villes redevenues libres.


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